Moi-même, je me suis déçu

Entretien Paul Léautaud et Robert Malet

NOUVELLES DATES :
Dimanche 23 mai 2021 au Manège à Maubeuge
Samedi 19 septembre 2020 à 14h au Théâtre Saint Gervais à Genève
Samedi 12 septembre 2020 à 14h au Centre Culturel Suisse de Paris en partenariat avec le festival de littérature vivante du Centre Georges Pompidou

« Une mère un peu catin qui m’a laissé tranquille dès ma naissance, un père qui était un brillant cascadeur plein de succès de femmes et qui ne s’occupait pas de moi. Enfin, ces gens qui m’ont laissé faire ma vie moi-même… je trouve que c’est quelque chose3. »
Paul Léautaud

Robert Cantarella
Romain Daroles

Lumières Philippe Gladieux

Création le 14 septembre 2019 au Festival de la Bâtie et théâtre de Saint Gervais

En 1950, à la demande de Robert Mallet, Paul Léautaud accepte avec réticence d’enregistrer, pour la radio qu’il n’aime pas, une suite de 28 Entretiens sur une chaîne de la Radiodiffusion française, les lundis vers 21 h 15 et les jeudis à 21 h 40. Chaque entretien dure environ 15 minutes.
Léautaud n’a pas connaissance à l’avance des questions. L’opposition entre le ton volontairement conformiste et solennel de Mallet et la verve anticonformiste de Léautaud font merveille. « Le vieux, c’est Mallet, le jeune, c’est Paul Léautaud », écrivent les critiques. « Nous n’avons jamais eu d’entretien aussi vivants, intéressants et qui aient un pareil succès » écrit Paul Gilson. « Je n’en reviens pas, on ne parle que de cela » dit Gide, peu avant sa mort. Devant le succès remporté, une deuxième série de 10 entretiens commence le premier dimanche de mai 1951, à 20 h 30.
Les propos de Léautaud sont bien sûr jugés trop audacieux pour être entendus dans leur intégralité. Tout ce qui touche à la famille, à la sexualité, à l’homosexualité, et notamment à celle de Gide, à l’armée et à la patrie, aux comportements des gens de lettres à la Libération est soumis à la censure. Mallet et Léautaud doivent revenir enregistrer certains passages pour les rendre conformes à ce que la radio peut offrir à ses auditeurs. Léautaud note le 2 novembre 1950 dans son Journal, à propos de la scène, racontée par lui, où Firmin Léautaud couche avec sa mère et sa tante dans le même lit : « Le directeur de la radio a jugé qu’on ne pouvait offrir un pareil sujet aux familles, les familles dans la plupart desquelles il s’en passe bien d’autres. »

Après avoir, depuis huit ans, copier les enregistrements des séminaires de Gilles Deleuze, et avoir interprété ces cours pour en faire une performance Faire le Gilles, je propose de continuer ce travail de copie de voix et d’invention de jeu avec ce matériau sonore accompagné par Romain Daroles. Avec Romain nous nous sommes rencontrés à l’école de la Manufacture, il était élève et j’étais enseignant. Son goût sans limite apparente pour la littérature et ses puissances d’insoumissions nous a fait imaginer Paul et Robert.
Ces entretiens sont une des folies au sens d’une excroissance déraisonnable de paroles et d’idées telles qu’aucun équivalent n’existe dans le domaine de la radio. Paroles libres et violentes, drôles et cruelles, sans aucune vergogne et surtout sans normes ou convenances du politiquement correct qui réglera un peu plus tard ce type d’émission, il semble qu’aucune censure ne viennent empêcher les aveux et opinions de Paul Léautaud. C’est une histoire de la littérature, de la poésie et du théâtre qu’il verbalise, et Robert Mallet le suit tant bien que mal, tente de le rattraper, maintient le cap, se laisse envahir, déborder. Ce paysage de paroles est unique et jubilatoire.
Nous voulons réinterpréter en copiant leur voix par le moyen des oreillettes ce document exceptionnel.
Robert Cantarella

Performance de 9 heures
Documents : INA